• Episode 12 – Mary Poppins et le peigne empoisonné

      « Deux milliards d’impôts nouveaux !

    Moi j’appelle plus ça du budget, j’appelle ça de l’attaque à main armée ! »

    Jean-Paul Belmondo, La chasse à l’homme. 

    Où la princesse trop confiante baisse la garde. 

    La reine s’adresse à Platt-Fuss :
    - Je suis grillée comme vedette de la télé. Tu n’aurais pas dans tes cartons un personnage que je puisse incarner et qui redonnerai confiance à la mijaurée ?
    Le sorcier maléfique plisse le front, signe d’intense réflexion jusqu’à temps qu’un sourire teigneux détende son visage :
    - Tout le monde connait la gouvernante-magicienne qui gratte chez la famille Banks en s’occupant de leurs quatre moufflets. Distinguée et coquette, elle présente tous les critères d’une personne inoffensive et les momignards de notre contrée la connaissent. Qu’en penses-tu ?
    - Tu ne crains pas qu’elle se méfie ? Londres, ce n’est pas la porte à côté. Comment vais-je justifier ma présence par ici ?  
    - Te caille pas le raisin, je vais t’affranchir ! 

    Platt-Fuss lui explique par le menu, son plan que la Reine accepte et le soir après avoir répété le mot magique indispensable pour conclure, elle part se jeter dans les torchons toute ragaillardie.

    Tandis qu’elle est confortablement installée dans les bras de Morphée...
    Pour les ceusses qu’auraient fait péter les cours de Mythologie, je rappelle que Morphée n’est pas une greluche, mais un greluchon. Dans la mythologie grecque, Morphée, dieu des rêves, est le fils d’Hypnos, dieu du sommeil et de Nyx, déesse de la nuit. Il est souvent représenté par un jeune homme tenant un miroir à la main et des pavots soporifiques de l’autre (l’ancêtre du chichon ou haschisch pour ceux qui ne maitrisent pas le parler jeune et que sont allés ni au collège, ni au lycée). Il donne le sommeil en t
    ouchant une personne avec ses pavots. Il lui procure également des rêves pour la nuit. Les bras étant symbole de sécurité mais aussi de force, on comprend pourquoi cette image est restée pour désigner une personne qui dort profondément.

    La Reine fait un rêve chouettos : sa belle-fille a enfin passé l’arme à gauche et elle peut se pavaner à la cour où les échines-courbées rivalisent de tournures alambiquées pour vanter ses mérites et s’extasier sur sa beauté… Elle poursuit ses rêves maléfiques où cette fois, elle enferme par un sortilège, Gaston dans une lampe à huile, lorsque au moment de savourer sa mauvaise blague, le Lapin Compte-Minute la réveille à la petite aube, sur le coup des six plombes et demi.

    Pour les ceusses qui s’interloquent, je précise qu’il s’agit d’un gros lièvre blanc, cousin germain du lapin anglais d'Alice, une momignarde de la gentry qui crèche au pays de la mère Veille. Celui-ci exerce les fonctions de réveille-matin car, à l'inverse de son cousin, il n’est jamais en retard. Il dispose, dans un  appartement, contigu à ceux de la marâtre, d'une petite pièce équipée d’un ensemble de trois sabliers. Le premier déverse son contenu en une heure, le deuxième en un quart d'heure, le troisième en trois minutes ; ce dernier ne sert d’ailleurs qu’à la cuisson des œufs à la coque dont le bestiau est particulièrement friand.
    Comme chaque soir, Il prend son poste un peu avant minuit, et attend que le pétzouille branché sur l'horloge du beffroi, commence sa patrouille, sa hallebarde à la main, en braillant : « il est minuit, dormez en paix braves gens !», dès cet instant, notre grandes-oreilles déclenche son chrono-sable. Après avoir tourné six fois le grand sablier et deux fois le moyen, il tire sur le cordon placé le long du mur mitoyen à la chambre royale. Ce cordon actionne de l’autre côté un pied articulé qui propulse d'un coup dans les miches, un petit oiseau, un coucou suisse, hors de son nichoir. Ce dernier réveillé brutalement et en colère, piaille au dessus du pucier royal, réveillant à son tour la Reine qui lui balance sa mule de vair, pour qu'il retourne dans sa boite.
    Je rassure les lecteurs, cette coutume barbare est désormais interdite par un décret inspiré, par la Société Protectrice des Emplumés dirigée par Frigide Darbot, une ancienne star du cinématographe.  
    La Reine après avoir pris son benco et s’être apprêtée, et pour éviter le risque d’un retour anticipé des mini-mineurs, se décabane et trace sur le ruban qui conduit à la chaumière des nains où elle arrive en fin de matinée. Elle est revêtue du costume ad hoc’ de la nurse, bitos et pébroque compris ; elle s’asperge le visage du spray de la mixture concoctée par Platt-Fuss. L’illusion est parfaite, elle est devenue le portrait craché de Mary Poppins. Elle toque à la lourde.      
    - Qui êtes-vous et que venez vous faire ici ? Demande Blanche-Neige.      
    Episode 12 – Mary Poppins et le peigne empoisonné- Je m’appelle Poppins, Mary Poppins, déclare la marâtre qui avait vu tous les films de James Bond ! Je dois signer un contrat avec les parents de Laura surnommée, la Marie pisse-trois-gouttes. Connais-tu  cette famille ? Puis-je entrer ? Nous serions mieux à l’intérieur pour en parler !      
    - Désolée ! Je ne peux délourder, mais approchez-vous de la fenêtre à main droite !

    La Reine se déplace vers la droite. Elle se retrouve pique-plante devant un fenestron qui certes peut laisser passer une personne, à la condition qu’elle soit de la taille d’un mannequin anorexique mais qui ne permet pas, à un intrus potentiel, même en se contorsionnant de pénétrer par effraction dans la maison. Elle n’en est pas contrariée car cette réaction était prévue ; le plan consiste à rester à l’extérieur pour endormir la méfiance de la princesse avant de lui porter l’estocade. Celle-ci a d’ailleurs ouvert la vitre et se montre curieuse d’en apprendre d’avantage.      
    - Vous ne gardez plus les enfants Banks ? Comment êtes vous arrivée jusqu’ici ? Je connais bien Caroline, la mère de Laura, mais elle ne m’a pas parlé de vous ? Pourquoi aurait-elle besoin d’une nurse ?     
    La fausse Mary Poppins sourit et prend la parole :      
    - Bigre ! Quelle déferlante de questions. Ne sommes nous pas dans une contrée qui d’ordinaire est plus calme qu’une cour de récréation en période de vacances scolaires ? J’ignore tes craintes mais ne te caille pas le raisin, je ne vais pas m’éterniser. Indique-moi seulement le chemin pour rejoindre ton amie. Mais tout d’abord, pour répondre à ta demande, je te précise que les enfants Banks sont en villégiature avec leurs parents et Caroline m’a sollicitée pour que Laura ne soit plus un garçon manqué et apprenne les bonnes manières du grand monde. Comment suis-je venue ? J’ai tout simplement utilisé un courant ascendant qui a poussé très rapidement mon parapluie jusqu’à ta chaumière. Le trajet a été si rapide que j’en suis toute décoiffée et mâchurée à cause de mon rimmel qui a coulé. Pourrais-je avoir un miroir pour me dépoutroner ?        
    Blanche-Neige fait rapidement fonctionner ses boyaux du cerveau :        
    - Tout le monde sait que Mary se déplace avec son trogne-pouce magique comme si elle est aux commandes d’un planeur. Ensuite, la momignarde de Caroline a effectivement besoin d’être recadrée car elle ressemble davantage à Petit Gibus le gamin de Longevernes, le village célèbre par sa fameuse bataille dite « Guerre des boutons », qu’à une vraie jeune fille. Enfin, la coquetterie de Mary est aussi légendaire que son habitude de se regarder dans les vitrines des magasins ; il est donc logique qu’elle me réclame un miroir. Je vais le lui apporter et faire un dernier test, conclut en pensée, la Princesse.       
    C’est ainsi qu’elle revient rapidement avec l’objet souhaité et dépose deux verres et un cruchon d’eau fraiche, sur le rebord du fenestron.       
    - Ne trouvez-vous pas qu’il fait soif ? Dit-elle négligemment.       
    - Tu as raison ma belle ! répond la travestie. J’ai toujours quelques sirops dans ma besace. Quel parfum désires-tu ?        
    - Pomme-cassis ! 
    - Parfait, approche ton verre !     

    La Reine affranchie par son sorcier de cousin avait eu la précaution de remplacer son sac Hermès par une imitation du sac, apparemment vide, de la gouvernante et duquel elle pouvait sortir une foultitude d’objets les plus divers ainsi que n’importe quel sirop qui corresponde aux demandes les plus farfelues. Le piège était donc en train de se refermer car la gisquette était maintenant persuadée d’avoir affaire à la véritable Mary Poppins.         
    Tout en retouchant son maquillage, la reine observe sa bru qui griffonne sur un papelard, sorti de son sac Vuitton, un plan, assorti d’indications, pour lui permettre de se rendre à la petite maison dans la prairie.        

    - Ce n’est plus le moment de pinailler, il faut que je profite de mon avantage. Un passage en force me semble réalisable ! décide la mauvaise. Elle pronnonce le mot magique :        
    - Supercalifragisticexpidélidocious ! provoquant à cet instant, un léger zéphyr qui se manifeste en soulevant quelques mèches de la chevelure bien ordonnée de Blanche-Neige, lesquelles viennent se positionner devant ses yeux. L’occasion est trop belle et la Reine s’empresse de la saisir.         
    - Ne te casse pas le bourrichon, j’ai un peigne dans ma trousse à maquillage, penches la tête, je vais te recoiffer !         

    « Fatalitas ! » Aurait-dit Chéri Bibi. En deux coups de cuillère à pot, le sort de la Princesse est scellé. D’un geste rapide la marâtre, écorche le cuir chevelu de sa belle-fille qui se redresse la respiration coupée sans pouvoir dire un mot s’abousant une fois de plus sur le carrelage de la cuisine. La reine arnouche la malheureuse qui git inanimée au sol. Elle aurait bien voulu s’assurer que la punaise a bien avalé sa chique, lorsqu’un bruit bizarre, une sorte de pétarade, qui allait se rapprochant, l’incite à se barrer pour ne pas se faire arquepincer. Elle calte vers son château en maugréant :
    - Gaston n’a pas intérêt à me faire poireauter pour me confirmer que j’ai enfin le ticket gagnant. Sinon je le renvoi en port du au calife de Bagdad
    .
     

    Fin de l’épisode, à suivre.

    Nos nerfs sont mis à rude épreuve, la deuxième tentative d’assassinat serait-elle la bonne ?

    Réponse A : Oui et la voiture qui rallège est conduite par « Le chasseur de sorcières » ; il va remplacer le cadavre de Blanche-Neige par celui d’un sosie chargé d’infiltrer le village de Storybrooke où, dans un monde parallèle, la méchante reine est le maire ; il pourra ainsi l’éliminer et mettre la fausse Blanche-neige sur le trône vacant. Ensuite... mais je déraille, je suis en train de dévoiler une nouvelle histoire.
    Réponse B : Blanche-neige ayant dévissé son billard, la marâtre après avoir eu confirmation de Gaston, va renvoyer ce dernier en Perse. Elle va investir Storybrooke où résident tous les personnages de contes pour se faire élire maire et grâce à sa magie les rendre amnésiques, bloquer le temps et rester éternellement la plus belle en étant toujours crainte et respectée par l’ensemble de ses administrés.
    Réponse C : Fabulgone est en plein délire et pétage de plombs. Revenons à la normalité. Ce sera Caroline qui sauvera in-extremis la vie de la princesse grâce à l’aspi-venin qu’elle garde toujours dans son sac à main Prada.
    Réponse D
     : L’ambulance vient d’arriver au domicile de Fabulgone. Deux infirmiers maous costauds le saisissent sans ménagement et lui mettent la camisole avant de l’embarquer pour Charenton. Fin du feuilleton !!!

    Glossaire :
    Se jeter dans les torchons, se pieuter : aller se coucher.
    Momignard, momignarde : garçon et fille enfants ; greluche, greluchon : fille et garçon adultes.
    Petzouille : homme du commun.
    Se cailler le raisin : s’inquiéter.
    Se dépoutroner : une poutrone est une femme de mauvaise vie, trop ou mal maquillée et donc se dépoutroner c’est reprendre un visage sans excès de maquillage.
    Trogne-pouce, ce mot était utilisé par la mère Cotivet pour désigner son parapluie. Notre pipelette lyonnaise, interprétée par Elie Perigot Fouquier, se produisait sur radio France Lyon de 1927 à 1971. Elle habitait au « cent moins n’un » 99 Montée de la Grand’Côte en bas des pentes de la Croix-Rousse.
    Pinailler : tergiverser, trop réfléchir avant d’agir.
    Se casser le bourrichon : réfléchir sur ce qu’il faut faire.
    Poireauter : attendre debout ; en parler lyonnais on dit être pique-plante. 


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