• Dans une guerre, c’est toujours l’adversaire qui commence !
    Francis Blanche
     
    Où ce conte pourrait bien tourner au film d’horreur !   

    La reine ordonne à Gino, son larbin en chef : T’as cinq broquilles pour que Marcel le garde-chasse ramène sa viande dans ma carrée sinon c’est toi qui le remplacera.
    Précisons que Marcel était eunuque. Il avait été l’amant de la Reine avant qu’elle ne lui fît couper les choses de la vie après l’avoir chopé en train de folâtrer avec Lady Chatterley, laquelle, avouons-le sans euphémisme, était quelque peu dévergondée. Il ne lui suffisait pas d’être à la colle avec le jardinier du palais, elle fricotait en interpellant tous les mectons qu’elle avait à la bonne et leur demandait de l’accompagner dans les bosquets pour lui faire voir la feuille à l’envers (c’est beau comme image, je la tiens de papa, une périphrase très champêtre). Vous l’avez compris c’était une vraie nymphomane.
    Gino qui tient à ses attributs comme le buvanvin tient à son litron de picrate (généralement un Cep Vermeil, un gros rouge qui tache aussi gouleyant et délicat qu’un mélange de pétrole brut et d’acide sulfurique), fait fissa pour dégoter Marcel. Il trouve celui-ci en train de faire ses vocalises car il s’est recyclé dans le chant lyrique puisque sa voix était le seul instrument dont il puisse encore jouer.

    - Sympa tes vocalises, lui dit Gino ! Désolé de t’interrompre, mais la mauvaise te demande de ralléger presto.

    Gino entretient des relations très amicales avec Marcel, c’est pourquoi il n’hésite pas à affubler la reine de sobriquets désobligeants sans crainte que ses paroles soient répétées. Nul n’ignore que dans ce château, la délation est monnaie courante et gare au malheureux qui est dénoncé pour avoir dégoisé en mal sur la mégère. Il risque la pire des punitions qui consiste à écouter en boucle, pendant deux heures, la dernière chanson du barde, auteur compositeur et chantre officiel du palais, Tony Siro : « Ma reine est là ».

    Marcel remercie et se pointe illico dans le burlingue de la Reine Mère qui l’affranchit, séance tenante, sur ses perfides intentions :
    - Gicle sans trainailler vers Blanche Neige. Déballe lui des salades comme quoi un lapin s’est pris la patte dans un piège à loup ou alors que le loup est en train de chercher des crosses à un agnelet qui va se désaltérant dans le courant de l’onde pure qui coule au pied de la fontaine. Vu qu’elle fait partie de la S.P.B.I.F.L.F. (Société Protectrice des Bestioles Issues des Fables de La Fontaine), elle va se laisser berlurer et te filer le train. Une fois dans la forêt, avec ton surin, tu n’auras plus qu’à lui trancher le corgnolon. A ton retour, raboule-moi ses poumons, son foie, sa rate et son cœur encore chauds. Je les donnerai à briffer à mes clébards. A moins que je ne les serve en fressure (pour les ceusses que sont de fins gastronomes, je conseille la fressure de porc à la vendéenne où les abats sont préparés en civet avec le sang et les couennes de l’animal) et en brochettes à la garden-party que le comité des fêtes organise samedi prochain pour fêter mon retour. Ce sera bonnard car je participerai ainsi gratos aux frais.
    - Banco ma reine, déglutit l’eunuque d’une voix de fausset.
    Connaissant les habitudes de la gisquette, il la rejoint et s’assoit à ses côtés sur le banc du jardin qui borde ses appartements ; elle est en train de lire le dernier roman de Barbara Cartland « Un si gros mensonge », lecture prémonitoire, n’est-il pas ! Marcel dégoise son baratin à la michetonne qui lui file le derche sans rouscailler. Elle n’a aucune raison de se garder à carreau vis-à-vis du garde-chasse qui lui a servi de précepteur quand elle était devenue orpheline. Toutefois, elle ne part pas sans biscuit. Elle rajoute dans son sac Vuitton qui ne la quitte jamais, une boite de pansements, un flacon de mercurochrome et divers objets de première nécessité, mascara, rose à joue, rouge à lèvre, flacon de patchouli... c’est-à-dire un inventaire à la Prévert que les machos et les aigris qualifient de futilités.

    Le ciel est limpide. Un doux soleil en ce début d’été éclaire la prairie. Les oiseaux gazouillent, s’interpellant de branche en branche. A l’orée du bois, les champs sont couverts de boutons d’or, de pâquerettes et de coquelicots. Blanche neige se dit qu’elle composera à son retour un bouquet champêtre pour sa belle-doche la reine. Ce qui prouve bien qu’elle est sans méfiance. Mais, terminons avec cette partie bucolique, rangeons nos violons et retournons à notre histoire.

    Nos deux personnages se pointent à l’entrée de la forêt, Marcel est suivi de la minette qui pousse sa goualante, « Un jour mon prince viendra… », une ritournelle qu’elle a entendue dans la dégoulinante d’un film des studios Disney. La piailleuse lui brise les portugaises avec sa voix pointue et ça lui perturbe les neurones, l’empêchant de se concentrer sur la façon dont il devra suriner la gueuse. L’occase se présente lorsqu’ils arrivent au bord de la rivière où les attend un spectacle bien choupinet. Un agnelet liche paisiblement la baille à côté de son copain le loup qui se tape un pan bagnat (oignon, radis, tomate, anchois, thon, poivre, ail, basilic, olive, œuf, sel) car il est allergique à la viande rouge. Un peu plus loin, un lapin fait la coursette avec une tortue et une cigale gratte sa guimauve au bal des fourmis.

    Je suis ravie de zyeuter que tout baigne icigo dit en souriant la princesse en sortant le panier pique-nique de son sac Vuitton et en rajoutant à l’attention de Marcel :

    Blanche Neige - 2ème épisode - Marcel le garde-chasse Reposons-nous un moment, reprenons des forces. J’ai apporté quelques tartines de Nutella, de la marmelade pommes coings aux quatre-épices et un thermos de thé glacé à la pèche blanche. En areluquant la mine déconfite du bonhomme, notre jouvencelle sourit  et précise :  qte marpaille pas la comprenette, j’ai aussi pour toi un sandwich au sauciflard, un calandos bien coulant et un kil de rouquin. Pendant que j’installe la bectance sur la nappe à carreaux rouges et blancs (ça rappelle les premiers congés payés de 1936 avec la très belle photo de Doisneau du déjeuner sur l’herbe qui était une pub pour Renault), va  mettre le litron au frais dans la vase, puis fais un petit viron dans les alentours pour vérifier que rien ne cloche et prévient les fourmis qu’elles ne viennent pas nous les briser en s’invitant gratos au frichti ! 
    Marcel feint de s’exécuter mais il revient en loucedé sur la pointe des ripatons. Sans plus attendre, il sort l’eustache de son étui en s’approchant de la princesse qui lui tourne le dos, penchée sur son panier occupée à préparer le pique-nique.


    Mille sabords ! Serait-ce le commencement de la fin au dénouement tragique ! Que va-t-il advenir de la pauvrette ?
     
    Réponse A : Marcel obéit à la reine et commet son horrible forfait en tranchant le corgnolon de la minette 
    Réponse B : Il va d’abord casser la croûte avant de prendre Blanche-neige en otage pour obtenir une rançon.
    Réponse C : Trop sensible, il va tout raconter à la princesse et lui laisser la vie sauve.
    Réponse D : Capturant la princesse, il va la vendre comme favorite au calife Haroun El Poussah et partager les gains avec le grand vizir Iznogoud son complice.

    Le suspense est trop insoutenable, je sais pas si je pourrais vous raconter la suite. On est pas sorti de l’auberge, faut que je me requinque. Je vous laisse, je vais me préparer une salade de clapotons, une andouillette beaujolaise et tirer un pot de Brouilly de ma cenpote.

    Glossaire :

    Tony Siro : « Ma reine est là » celle ou celui qui trouvera le nom du chanteur et le titre de la chanson gagnera le droit de rejouer au prochain épisode.
    Briser les portugaises : casser les oreilles
    Gratter sa guimauve : jouer de la guitare
    Kil de rouquin : c’est quasi un pléonasme car un kil ou kilbus est toujours une bouteille d’un litre de vin rouge et rouquin est à la fois le sang et le vin rouge.La vase : comme la baille, la flotte, c’est de l’eau qui plus est, claire et même potable, mais les affranchis et aussi Gnafron se méfient de ce liquide plus dangereux pour la santé que le vin. D’où cette comparaison avec la vraie vase.
    Se marpailler la comprenette : être contrarié

    Nota benêt : je suis disponible pour toute précision sur un terme ou une expression argotique qui vous semblerait peu claire ; mettez un petit commentaire et j’y répondrais.


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  • Entre deux épisodes historiques, à la demande de mon lectorat qui souhaite retrouver ma truculence, je renoue avec la tradition des contes loufoques revisités dans la langue de mes maîtres Audiard, Dard, Grancher, Dac...

    J’ai compris que le Père Noël n’existait pas quand j’avais cinq ans. Je suis entrée dans un grand magasin et il m’a demandé un autographe. »
    Shirley Temple

    Où la Reine se montre d’entrée un tantinet égocentrique !

    Il était une fois, une reine teigneuse et jalmince, une princesse un brin nunuche en apparence et qui aurait pu être prem’s à l’élection de miss Contes de fées, un prince qui ne pointera ses biscottos qu’à la fin de l’histoire comme la cavalerie dans les vieux westerns pas encore spaghettis, sept rase-moquettes qui bricolent dans les diams, et enfin une tripotée de seconds couteaux tous plus croquignolets les z’uns que les z’autres... Pour la compréhension du texte, j’écris même les liaisons ; vous dire si j’ai de la conscience professionnelle ! Et je le précise pour le cas où un pingouin y s’aviserait de faire des remarques sur mes fautes d’orthographe. Enfin brèfle comme le disait Denis Papin, pas le footballeur, l’inventeur de la bouilloire électrique, commençons …

    Par une belle matinée d’été (j’aurais pu écrire de printemps, d’automne ou d’hiver, mais une belle matinée, c’est tout de même plus sympa en été), sur le tarmac de l’aéroport de Saint-Exupéry, que les Lyonnais des autrefois appelaient Satolas, l’escalier mobile est plaqué contre la porte de sortie d’un coucou qui s’ouvre, déversant son flot de passagers pas mécontents de retrouver le plancher des vaches. Parmi eux, reconnaissable à sa mine renfrognée, figure la Reine de notre royaume imaginaire. Pendant l’atterrissage, elle était restée collée à son fauteuil en serrant les miches jusqu’à temps que l’avion marque l’arrêt définitif et que le commandant de bord coupe les gaz de l’appareil. Soulagée, elle décompresse et comme de son côté elle n’a pas coupé ses gaz, elle se laisse aller en se fendant d’un rot aussi discret qu’un évier qu’on débouche, tout en ronchonnant :
         - J’aurais jamais du boire cette saloperie de mousseux ! C’est sûr que quand tu choisis un « Low-cost », la compagnie ne va pas s’allonger d’une coupe de roteuse de Don Pérignon ! Et qu’est-ce qu’ils ont tous ces locdus à applaudir à la fin du voyage ? Entre les trous d’air, le siège rembourré aux coquilles de noix, l’hôtesse qui n’a même pas pris soin de s’épiler la moustache et mon voisin de devant qui ronflait comme un élevage de gorets, manquerait plus qu’on se crashe à l’arrivée ! Si j’ai encore des aigreurs demain, je me fais rembourser mon biffeton de troisième classe !

    Elle avait quitté son château quelques semaines plus tôt pour se rendre au Brésil ousseque les chirurgiens esthétiques sont, paraît-il, de véritables pointures. Soucieuse de son apparence, c'était la période de son ravalement de façade annuel, aussi avait-elle pris le forfait entretien, pièces et main d’œuvre inclus, avec retouches de carrosserie et elle avait hâte de juger des résultats. Elle grimpe dans une brouette en demandant au chauffeur de taxi de faire fissa. Celui-ci voyant la tronche de carême de la mégère, ne se le fait pas dire deux fois et il roule sans moufter. A l’arrivée, elle refile au taxi les dix sacs de la course sans lâcher le moindre pourliche vu qu’elle est constipée du morlingue. 
    Elle donne quelques ordres à deux ou trois loufiats obséquieux qui, au risque de choper une scoliose, lui font des courbettes à s’en lécher leurs propres pompes et elle s'enquille bien vite dans ses appartements en refermant la lourde après avoir demandé qu’on ne vienne pas la seriner et lui casser le bonnet avec des problèmes d’intendance. 

    Elle se déloque et enfile son maillot de bain deux pièces, motif panthère avec soutifs à balconnets qu’elle avait casqué en solde à la boutique ‘’Dessous chics pour mémères perlouzées’’, puis elle se pointe devant son miroir magique. Attention je t’explique ! Pas le miroir que tu trouves chez le premier blaireau venu dans le hall d’entrée, entre le chausse-pied à roulement à billes et le pébroque avec pommeau à tête de canard. Non ! L’ustensile est constitué d'un écran plat LED 4K, 121cm, full HD avec en plus, double arbre à came en tête et zygomatiques intégrés. Ce n’est pas de la quincaille assemblée chez les citrons asiatiques, mais du matos de premier choix. La reine choppe la télécommande qui remplace les baguettes magiques, lesquelles ne sont plus utilisées, sauf par quelques ringards lors de galas de bienfaisance organisés au profit de la sauvegarde d’espèces menacées comme celles placées dans les coffres planqués en Suisse. Elle presse la touche "on" et sur l'écran apparait Gaston, un génie de première classe qui se met à lui passer la brosse à reluire car lui aussi connait l'engeance. Gaston avait fait ses classes à l’école spécialisée du calife de Bagdad. Il avait obtenu son diplôme avec mention ‘’très bien’’ et une citation dans l’épreuve optionnelle des meilleurs cireurs de godasses. Il avait également reçu le premier prix de rapidité en s’enquillant en moins de cinq secondes dans une lampe à huile.

    Arrêtes tes charres, renaude la Reine. Soyes à ce que tu fais, reluques-moi et dis-moi : ne suis-je pas la plus chouquette du royaume ? 

    Gaston toussote et s’éclaircit le corgnolon avant de bavocher : ok ma poule ! T'as le nez façon Cléopâtre, les roploplos taillés à la Sophie Marceau. T'as plus les miches en gouttes d'huile et ton troisième lifting tient la route. Seulement il y a un blême car Blanche Neige, ta belle fille, est plus choucarde que Toi. 

    Comment ça ! éructe la reine, cette greluche qu'est toujours loquée façon première communiante qu'on dirait l’indéboulonnable  Chantal, la bourgeoise de Jean-Jacques, qui pousse sa goualante aux arbres de noël de l’Elysée depuis plus de vingt piges ! 

    Oui, mais elle n'a que dix huit balais, les nibards à la coque à l'amour, le dermuche qui ondule et qui attire la main de l'homme, et aussi un sourire à faire péter les boutons de braguette d'un puritain. Faut dire qu’en plus, elle n'a pas tes heures de vol.

    Ferme ton clapet, tu jactes que des âneries et tu me files les abeilles ! 

    La Reine en pétard enfonçe la touche "off" et juste avant que l'écran ne s'éteigne, le génie susurre : je ne mens jamais… 

    Pour ne pas péter les coutures de son lifting facial, elle se retient de pousser le cri qui tue, et se met à tourner en rond dans sa piaule en maugréant. De temps en temps elle jette quelques verres, vases et assiettes en arcopal par la fenêtre sous laquelle attendent les préposés à l’ire royale affublés de gros édredons en plumes d’oie. Ils couratent sur le gazon et mouillent la chemise en réceptionnant les objets jetés. Ben oui, les pauvres malheureux ! Leur mission consiste à ce qu’aucun élément de vaisselle ne casse car la patronne est tellement rapiate qu’elle retient le prix des ustensiles brisés sur leurs salaires, lesquels d’ailleurs sont tout aussi maigrichons qu’un mannequin anorexique.

    Epuisée par son manège et les soufflets en feu, elle se vautre dans un grand fauteuil empire pour calmer les battements de son palpitant en se disant : c’n’est pas cette chipette de Blanche neige qui va rouler des mécaniques. Je n’ai pas aligné trois briques aux toubibs brésiliens pour me faire gauler la place de prem’s au concours des plus beaux gigots du royaume. Je m’en vais te l’allumer, l’éparpiller façon puzzle, la zigouiller, l’écrabouiller …
    Elle gamberge ainsi quelques broquilles
    * jusqu’à ce qu’un sourire teigneux remplaçe sa moue de dépit. A force de se triturer les boyaux du cerveau, une loupiote s’est mise à clignoter dans son caberlot. Elle a muri sa rebiffe, se lève et appuye sur le bouton d’appel de l’interphone placé sur son burlingue.

    Que va décider la vieille peau ?

    Réponse A : Décider de faire assassiner Blanche Neige en appelant son exécuteur des hautes oeuvres
    Réponse B : Faire jouer la garantie et changer de miroir comprenant un nouveau génie qui serait plus à sa botte.
    Réponse C : Retourner au Brésil se faire rembourser parce que pour avoir claquer trois briques, le résultat laisse à désirer.
    Réponse D : Tout oublier en biberonnant un kil de beaujolpif.

    Vu le suspens insoutenable qui se dégage de ce premier épisode, je laisse au lecteur le soin d’aller boire une bière ou tout autre remontant, de faire quelques exercices de relaxation, de partager ses impressions avec sa compagne, ou son compagnon si le lecteur est une lectrice. 

    J’ai beaucoup aimé les feuilletons radiophoniques comme « Signé Furax » ou ceux que je lisais dans les journaux et les magazines. Alors, à mon tour de dire :

    Fin de l'épisode à Suivre

    Glossaire :
    broquilles : minutes – « il est trois plombes et quinze broquilles à la dégoulinante de la bastoche » : « il est trois heures et quinze minutes à la pendule du salon
    constipée du morlingue : radin
    faire murir sa rebiffe : préparer sa vengeance
    les soufflets : les poumons


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