• Nos amis restèrent en Orient jusqu'en l'an 4 de l'ère chrétienne car, comme je le précisais dans l'épisode précédent, nous adoptons maintenant le calendrier actuel. 

    Ils avaient été invités à Rome par Quinctilius et Claudia, pour les fêtes organisées lors de l'adoption de Tibérius Claudius Nero, par l'empereur Auguste qui se trouvait sans héritiers après la mort tragique de ses deux derniers descendants  (ses petits-enfants : Lucius et Caius César, les fils de sa fille Julia). Tibère qui était le fils de Livie, troisième épouse de l’empereur, se trouva ainsi à 46 ans investi de l'impérium proconsulaire au rang de principat sous le nom de Tibérius Julius César. Après les cérémonies et les festivités du 26 juin, la famille Lunatix séjourna quelque temps chez leurs amis avant de retourner début août à Lugdunum.

    Trois mois plus tard, Jihane mit au monde une petite fille qu'ils prénommèrent Néfertari (la plus aimée de tous) en hommage à Néferet la grand-mère de l'enfant.

    Fabulan apprit à lire et à écrire à l'école des druides de l’Île-Barbe ; ils n'avaient certes plus le droit de pratiquer leur culte mais continuaient d'exercer leur rôle d'enseignants auprès des familles gauloises. Il s’initia à la culture égyptienne par sa grand-mère et également à celle des Persans par sa mère. A dix ans il tait devenu un enfant robuste espiègle, curieux et imaginatif.

    Ses parents avaient bercé son enfance en lui contant des fables à l'aide des deux poupées à gaine, le lionceau et le jeune garçon, qu'il avait reçu lors des saturnales suivant son premier anniversaire. Son grand-oncle Claudius Tartempio, parrain de son père aimait sculpter le bois et  lui avait fabriqué, d'autres têtes de bois qu'il réalisait en bois de tilleul. Il se trouvait donc avec un cuchon de personnages dont : un vieux druide, un fabriquant de sandales, porté sur le mulsum (vin miellé) ce qui lui conférait une trogne et un gros picou rubicond et un joyeux gone bien artet (dégourdi, rusé), copain du gnafre (savetier en gaulois). Tartempio avait aussi fabriqué une sorte de cache démontable en bois et tissu pour qu’il puisse se dissimuler à la vue des spectateurs. Fabulan aimait inventer des histoires avec ses personnages et les raconter à son entourage

    Il adorait sa petite sœur et donc, pour les cinq ans de Néfertari, il avait décidé de lui offrir un spectacle de marionnettes auquel toute la famille fut conviée ainsi que de nombreux petits amis de la fillette invités à l’anniversaire. Chacun prit place devant le castelet improvisé.

    L'histoire se passe dans la campagne de Briandas ; le druide Panégyrix est avec le Gnafre :

     

    - Je viens de terminer ma récolte de gui sacré pour la réunion annuelle de notre confrérie et je dois concocter une nouvelle recette pour l’élection du concours récompensant le meilleur cuistot au chaudron.

     

    - Je me souviens, lui rebrique le Gnafre, de ta recette de « joue de porc au carottes, oignons, céleri et vin rouge », c’était à s’en lécher les cinq doigts et le pouce. T’avais d’ailleurs reçu le premier prix, un laurier d’or.

     

    - Ouais, je dirais plutôt que c’est le vin rouge que tu as surtout adoré. Cette année, ça s’annonce plus coton avec des petits nouveaux talentueux comme : Bocusix, Robuchonus, Georgius Blancus, et d’autres pointures. Il y a même des marque–mal qu’y disent qu’on devrait aussi faire concourir les fenottes ; le monde il est vraiment tout tourneboulé. Mais entre nous, dit le druide en se tournant et retournant, j’ai dégusté un jour une poularde aux truffes à l’échoppe de la mère Brazierix, un délice que t’en aurais sucé les os jusqu’à la moelle, « poularde demi-deuil » qu’elle appelle son plat. Mais je m’égare. Je suis venu te demander de me garder mes branches de gui et de surveiller qu’il n’en disparaisse point.

     

    - Vous faites pas de souci, j’y veillerai, comme le lait sur le feu.

     

    Panégyrix s’en va. Son copain arrive et areluquant le tas de gui questionne :

     

    - Qu’est-ce que ça que c’est mon Gnafre, tu te recycles dans le commerce des herbes ?

     

    - Mais non le Gnaule (le Gnafre l’appelait ainsi depuis qu’il avait exercé un temps le métier d’assistant d’un charlatan, bouilleur de cru) c’est Panégyrix qui m’a confié une mission d’importance, surveiller sa  récolte de gui sacré.

     

    Les deux complices continuent de parler puis Gnafre sort quelques amphores de mulsum car il fait « souaffe » et tous deux boivent de « conserve ». Gnafre prétexte une urgence et laisse Gnaule tout seul. Celui-ci s’allonge contre un arbre et demande aux enfants de l’avertir si quelque chose se produisait pendant qu’il s’offre une petite sieste réparatrice.

     

    Gnafre avait décidé de faire une blague à son ami et il s’est en réalité dissimulé dans un buisson. Dès que Gnaule s’endort, il arrive par derrière avec une canne à pêche et commence de prendre un brin de gui. Les enfants hurlent :

     

    Gnaule ! Gnaule ! Gnaule ! Celui-ci se réveille et se lève en sursaut.

     

    Le gui ! Le gui ! Le gui, crient les enfants.

     

    Gnaule stupéfait constate qu’il manque un brin.  Il cherche alentour et dit aux enfants :

     

    - Je vais faire semblant de dormir, prévenez-moi si quelqu’un arrive !

     

    Il s’allonge de nouveau après s’être muni d’une grosse trique et fait semblant de ronfler, déclenchant l’hilarité des jeunes spectateurs.

     

    Gnafre avec sa canne à pêche essaie de nouveau d’attraper un brin de gui. Les enfants hurlent :

     

    - Le gui ! Le gui ! Le gui !

     

    Gnaule se lève et à grands coups de trique frappe Gnafre qui gémit et s’excuse de cette mauvaise blague. Tout est bien qui finit bien. Fabulan, remercie et salue l’assistance. Il reçoit en retour une magnifique ovation de tous les spectateurs, grands et petits.

     

    21 - Retour à LugdunumBien sûr ce succès fait qu’il est sollicité pour reproduire sa pièce dans d’autres familles et même à l’oppidum auprès des soldats et officiers romains.

     

    Petit à petit, le titre de la pièce qui était « Gnafre, Gnaule et le gui », devient  « le Gui de Gnaule » et les hurlements des petits quelques années plus tard conduisent à ce que l’on entende surtout :

     

    Gui Gnaule ! Vocable qui devient à cha peu, le prénom et le nom d’un jeune homme adroit, plein de finesse et de ruse.

     

    Gui Gnaule est devenu l’ami incontournable des enfants et la coqueluche du peuple qui voit en lui le symbole de Lugdunum.

     

    Étonnant non !

      

    A suivre…


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